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« Je ne suis pas la maladie, je suis bien plus »

Il y a quelques années j’avais écrit un article intitulé « Un mammouth sur mon utérus » dans lequel j’exposais que je n’adhérais pas vraiment au concept d’ « endowarriors ». D’un point de vue sémantique cela veut dire que les femmes atteintes d’endométriose sont des guerrières dans leur âme et dans leur corps… Je suis complètement d’accord aujourd’hui avec cette idée, mais… et les autres alors?

J’étais un peu plus nuancée que cela mais je voudrais tout de même revenir sur cet article à la lumière de mon expérience actuelle. Si vous voulez relire le premier opus c’est par là (« Un mammouth sur mon utérus »…) et vous verrez, à quelques détails près, mon approche de la maladie n’a pas tant changé que cela.

Écorce vulvaire

L’endométriose est une maladie qui fait de plus en plus parler d’elle et c’est tant mieux. Sa popularisation par la marraine de l’association Endo-France (https://www.endofrance.org/), Laëtitia Milot, ainsi que la mise en lumière de son combat pour être maman ont contribué à rendre plus visible la pathologie et sans nul doute à faciliter le diagnostic chez beaucoup de femmes incomprises pour leurs douleurs. Malgré tout, il suffit d’écumer les forums et autres groupes facebook pour se rendre compte que le travail est encore long et qu’il existe malheureusement toujours des femmes à qui l’on dit des atrocités avant qu’elles ne soient prises au sérieux. Les deux stars Lorie et Enora Malagré favorisent aussi le dialogue sur les plateaux télévisés et je trouve vraiment que c’est bénéfique et d’utilité publique.

Là où je crois qu’il y a un problème, si j’ose employer ce terme, c’est dans l’aspect « communautaire » qui gravite autour de la maladie. C’est pour ça que je dis « je ne suis pas la maladie ». Nous sommes bien plus que cela! En fait la maladie peut nous ouvrir des portes magiques.

Bien souvent la vie de femme endométriosique se résume à : antalgiques, douleurs, bouillotte, alimentation anti-inflammatoire, lit, toilettes, hémorragies, infertilité, problèmes intestinaux et j’en passe…. Tout un cortège d’habitudes auxquelles nous nous soumettons parce que nous n’avons pas le choix. Alors nous passons du temps à parler avec nos « endosisters » pour trouver un soutien, un mot compréhensif, un « je sais ce que c’est  » qui rassure et qui fait un bien fou. En cela la communauté est une précieuse aide car elle apporte ce que parfois l’entourage peine à donner aux malades. Je ne remercierai jamais assez les instagrammeuses et instagrammeurs qui œuvrent dans le sens de la maladie, du soutien et qui apportent tout un tas d’astuces pour aller mieux.

Cet écho, on peut le retrouver aussi avec d’autres personnes qui souffrent de maladies chroniques tout aussi invalidantes et incapacitantes. Ces personnes-là sont autant des « warriors » que les femmes qui souffrent d’endométriose. J’en avais d’ailleurs parlé dans l’article intitulé « Sois sage Ô ma douleur » (si vous voulez le relire c’est par là -> « Sois sage Ô ma douleur… » : vivre avec une endométriose.).Toutes les personnes qui se battent contre n’importe quelle maladie invalidante et/ou grave sont des guerrières.

Le revers de la communauté c’est que l’on baigne parfois un peu trop dans ce jus de désespoir et d’errance médicale et c’est difficile de prendre du recul quand on est en quête de réponses, d’un diagnostic ou qu’on est dans un protocole PMA. L’été dernier je me suis désabonnée de plein de forums sur lesquels je m’étais inscrite pour trouver du réconfort, et je ne regrette pas. D’ailleurs mon médecin m’avait mise en garde en me disant « faites attention, on peut lire tout et n’importe quoi » sur ces groupes et « à force de lire trop de témoignages négatifs ça peut vous miner le moral » et maintenant nous savons toutes et tous l’impact des pensées négatives sur notre vie quotidienne et notre santé.

J’ai d’abord trouvé de la consolation lors de mes posts, j’ai aussi apporté ma pierre à l’édifice des posts des autres et cela m’a beaucoup aidée. Néanmoins avec un peu de distance j’ai aussi remarqué que tout cela était effectivement beaucoup trop, trop de souffrances, trop de détails horribles à lire et à vivre sur l’infertilité, les heures aux urgences, les opérations, beaucoup de jugements aussi du type « Pourquoi tu te plains car tu n’arrives pas à avoir un deuxième enfant? « moi je » n’arrive même pas à en avoir un seul ». Cela m’avait fait de la peine pour les filles qui étaient venues expliquer leur désarroi de ne pas pouvoir concevoir un deuxième. Aucune souffrance n’est négligeable, ni comparable, ce n’est pas une compétition.

Résultat, ce qui devait être positif au départ est vite devenu source d’enlisement. Je recommande plutôt de se nourrir de l’aspect positif de la communauté car il existe des groupes, des comptes instagram plein d’humour et d’espoir, des associations formidables comme « Femmes Endo and Co » qui proposent une approche holistique et beaucoup plus large la maladie, et surtout des solutions adaptées à chacune avec des ateliers qui explorent des domaines aussi variés que la naturopathie, le yoga, la sophrologie, la gynéco émotionnelle, la sexologie…

L’identification à la maladie : « Je ne suis pas la maladie » : JE SUIS, et bien plus !

Lorsque je parle d’identification je parle du fait que si notre vie de femme est centrée sur ça, on ne vit plus et on ne fait plus rien. C’est passer du « je suis malade d’endométriose » à « je suis » tout court.C’est évoluer du « MA » maladie à « LA » maladie.

Bien souvent la maladie, après avoir été source d’immobilisme et de traumatisme, nous invite à nous (re)poser et à nous interroger sur ce qu’elle peut nous apporter. Si je m’identifie à la elle , je ne vois mon quotidien qu’à travers elle et tout est rythmé par les montagnes russes des douleurs/ rémissions. Du coup je ne vois plus ce dont je suis capable ni tout le chemin parcouru depuis le début du diagnostic…

C’est très difficile de changer ses habitudes et surtout de sortir de soi-même pour voir ce dont on est capable par ailleurs, mais on peut grandir au travers de la souffrance.

A titre personnel, « grâce » à la maladie j’ai pu :

  • approfondir la psychanalyse transgénérationnelle et comprendre les mécanismes qui régissent des familles depuis parfois, des générations. Je vous conseille l’ouvrage merveilleux de Bruno Clavier, Ces enfants qui veulent guérir leurs parents, 2019.
  • changer mon alimentation, connaître les réactions de mon corps et voir que ce que je croyais privation est en fait bénéfique pour mon corps. Je vous conseille d’être en contact avec un.e naturopathe qui vous expliquera votre terrain et ce qui sera bénéfique pour vous. En attentant vous pouvez lire le livre de Fabien Piasco, L’alimentation anti-endométriose – L’alimentation anti-inflammatoire pour vaincre les douleurs, réédité au début 2021. Si la lecture n’est pas votre copine, cette vidéo du naturopathe Fabien Moine est très instructive https://www.youtube.com/watch?v=P0LtaOxPT3U
  • avoir une approche de la sexualité différente : dans notre société on favorise beaucoup la sexualité exclusivement tournée vers la pénétration. L’endométriose n’est pas toujours l’amie d’une sexualité épanouie. Un ou une sexologue peut vous aider. Il existe des sexologues sensibilisé.e.s à l’endométriose, l’association https://www.femmesendoandco.org/ peut vraiment vous orienter sur ce sujet.
  • me réconcilier avec ma féminité. Le travail effectué par Maud par exemple en Gyn’émotion est absolument formidable. Rendez-vous sur https://www.laoniora.com/ pour découvrir le monde merveilleux de vos menstrues!
  • rencontrer des filles formidables, être encore plus patiente, acquérir la capacité de vivre et profiter plus intensément chaque moment où je me sens bien

Faire UN avec les phases les plus dures

Cela n’est pas en quelques semaines que j’ai pu tenir ce discours et je sais très bien que d’autres épreuves m’attendent comme pour les autres filles. Néanmoins j’ai cette ferme conviction qu’on a en nous une force insoupçonnée qui permet d’avancer, de résilier ( ce mot est à la mode souvent vidé de son sens!) , de passer les étapes de nos vies en devenant plus présent à nous-même.

L’esprit humain est enclin à adhérer complètement à ce qui lui fait du bien et fait du bien à son hôte, que ce soit une illusion ou non, mais dès qu’il s’agit de phases plus difficiles comme la maladie, il est plus compliqué de faire corps avec… son corps. Et pourtant ce serait le meilleur moyen de dialoguer avec lui quand celui-ci va mal.

Et vous, quelles sont vos solutions pour aller mieux, penser à autre chose?

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